1.La Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO) suit avec attention la situation inquiétante d’expulsion des Congolais de l’Angola qui arrivent par vagues successives dans les Provinces de Lualaba, du Kasaï Central, du Kasaï, du Kwango et de Kongo Central dans le Sud et l’Ouest de la République Démocratique du Congo.
2.Des milliers d’enfants, femmes, personnes âgées, malades, personnes vivant avec handicap, hommes et femmes valides… sont débarqués indistinctement comme de vulgaires marchandises, jour après jour, sur le sol congolais dans des zones de grande précarité où il n’y a pas de capacités d’accueil suffisantes pouvant leur permettre de recouvrer un minimum de dignité…
3.Au 27 octobre 2018, les statistiques de nos services de Caritas Congo asbl renseignent que 508 505 personnes sont arrivées en territoire congolais sans que les mouvements soient près de s’arrêter. Beaucoup de personnes expulsées déclarent avoir fait l’objet des brutalités et de graves violations des droits humains de la part des forces de l’ordre angolaises.
4.Ne sachant ni comment quitter la frontière ni où se diriger, la plupart des personnes errent dans les villages situés le long de la frontière où elles sont accueillies par les personnes de bonne volonté. Des milliers sont accueillis dans les locaux des églises, les écoles et les rares édifices publics. Faute de place suffisante, d’autres campent sous des abris de fortune ou passent la nuit à la belle étoile.
5.Les plus grands mouvements des refoulés sont enregistrés dans les provinces du Kasaï qui portent encore les stigmates de la crise du phénomène « Kamuina Nsapu » qui a déferlé sur la région il y a une année. La localité de Kamako à elle seule compte 206.680 personnes, un nombre qui dépasse largement celui des habitants de cette petite bourgade.
6.Ces retours massifs qui surviennent à deux mois de la tenue des élections générales en RDC sont de nature à perturber le déroulement normal de ce grand rendez-vous tant attendu par le peuple congolais. Ils menacent également la paix entre la RDC et l’Angola qui partagent plus de 2000 kilomètres de frontière commune avec des nombreux groupes ethniques situés à cheval sur les deux pays.
7.La CENCO exprime sa compassion et sa solidarité avec les personnes refoulées. Elle recommande :
a)Aux fidèles catholiques et aux personnes de bonne volonté de :
- Ne pas se soustraire au devoir de charité envers nos frères et sœurs qui rentrent de l’Angola, de leur réserver un accueil fraternel et de partager avec eux le peu dont ils peuvent disposer en se souvenant de l’acte de la veuve de Sarepta qui a partagé le peu qui lui restait avec le Prophète Elie (Cfr 1Roi 17, 8-24).
b)Au Gouvernement congolais de (d’) :
- Engager un dialogue franc et sincère avec le gouvernement angolais afin que le retour des congolais en situation irrégulière soit organisé et se fasse dans des conditions qui respectent leur dignité, conformément au droit humanitaire international auquel les deux pays ont souscrit en tant que membres des Nations Unies.
- Entreprendre tout ce qui est en leur pouvoir pour assurer un accueil et des conditions de vie dignes aux personnes qui rentrent ou qui sont déjà arrivées en territoire congolais afin de mettre fin à leurs souffrances.
- Organiser la réinstallation et la réinsertion socio-économique des personnes qui rentrent afin de préserver la paix et la quiétude nécessaire au bon déroulement du processus électoral.
- Prendre des dispositions nécessaires et durables d’encadrement, de promotion et de maintien des jeunes sur le territoire national en vue de diminuer leurs mouvements migratoires illégaux vers l’Angola.
c)A la SADC et à l’Union Africaine de (d’) :
- Se pencher avec diligence sur cette question qui porte atteinte aux droits de l’homme et menace la paix et la concorde entre les peuples de la région de Grands Lacs et de l’Afrique Australe.
- Inviter les deux gouvernements congolais et angolais au dialogue et à la coopération fraternelle pour arrêter ensemble les conditions de retour des congolais se trouvant en situation irrégulière en Angola.
d) A la communauté internationale et aux Nations Unies de (d’) :
- Intervenir auprès des gouvernements congolais et angolais en vue d’un dialogue franc et sincère et pour humaniser les conditions d’exercice de la souveraineté sur leurs territoires respectifs et dans le respect des droits humains.
- Se mobiliser pour porter l’aide humanitaire aux personnes refoulées de l’Angola dont les conditions de vie constituent une injure à la dignité humaine.
8.Que par l’intercession de la Vierge Marie, Secours des affligés et Notre Dame du Congo, Dieu bénisse le Peuple congolais.
Fait à Kinshasa, le 31 octobre 2018
Abbé Donatien NSHOLE
Secrétaire Général de la CENCO